Le Café Littéraire / sur le mariage... | ||
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Hamdi
était fils unique, et sa femme fut très choyée. Pierre Loti, Les désenchantées
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Je pensais que vous ne croyiez pas au mariage et à la famille. Le joug
et tout le reste, vous vous souvenez? Carlos Ruiz Zafón, L'ombre du vent
Ni
la famille de Katsuro, ni celle de Miyuki dont il ne restait que sa sœur
et ses oncles, le reste du clan ayant été massacré lors des raids
sanglants de hordes rebelles, n'étaient assez fortunées pour subvenir
aux frais d'un mariage shinto ―
il fallait prévoir un don pour l'entretien du
sanctuaire, rétribuer le prêtre et les miko en kimono blanc et
pantalon écarlate, acheter des coupes en laque rouge dans lesquelles
les époux boiraient le saké doré, ainsi qu'un rameau de sasaki aux
fleurs rose tendre qu'on déposerait sur l'autel pour conclure le
rituel. Didier Decoin, Le Bureau des Jardins et des Étangs
Rose
se marierait-elle un jour? Elle ne parvenait pas à imaginer la chose.
Un homme auprès d'elle, jour et nuit, dans son lit avec elle, qu'elle
devrait servir, dont elle dépendrait, qui la connaîtrait,
l'appellerait mon épouse, ma femme, comme on dit «mon chapeau» ou «mon
chien». Mais elle aussi, après tout, pourrait l'appeler mon époux,
mon mari, comme on dit «ma pelote», «mon cadre à broder». De plus,
ce n'étaient pas toujours les hommes qui régnaient. Agnès Desarthe, Ce cœur changeant
En
avril, Sophie entreprit un voyage à Saint-Pétersbourg pour tâcher
d'obtenir de l'empereur la levée de l'interdiction qui pesait encore
sur La sonate à Kreutzer. Comme toujours chez Tolstoï, cette
œuvre est en partie autobiographique. Comme lui, son héros montre à
sa fiancée son journal où sont consignées toutes ses aventures. Le
sujet du livre pose le problème du mariage et des rapports intimes
entre les époux. Vladimir Fédorovski, Le roman de Tolstoï
«
Mon cher ami, ne te marie que lorsque tu auras fait tout ce que tu veux
faire, lorsque tu auras cessé d'aimer la femme de ton choix et que tu
l'auras bien étudiée ; autrement, tu te tromperas cruellement et d'une
façon irréparable ! Marie-toi plutôt vieux et bon à rien ! Alors tu
ne risqueras pas de gaspiller tout ce qu'il y a en toi d'élevé et de
bon. Oui, tout s'éparpille en menue monnaie ! Oui, c'est ainsi ; tu as
beau me regarder de cet air étonné. Si tu comptais devenir quelque
chose par toi-même, tu sentiras à chaque pas que tout est fini, que
tout est fermé pour toi, sauf les salons où tu coudoieras un laquais
de cour et un idiot… Mais à quoi sert de… ? » Léon Tolstoï, La Guerre et la Paix - Tome I
Il avait été marié dans les années 1950, mais personne ne sait pourquoi sa femme l'avait quitté après seulement quelques semaines. On disait qu'il l'avait rencontrée par petite annonce: ils avaient correspondu longtemps avant de se découvrir. Était-ce la raison de l'échec de leur couple? Gourvec était peut-être le genre d'homme dont on aimait lire les déclarations enflammées, pour qui l'on était capable de tout quitter, mais derrière la beauté des mots la réalité était forcément décevante. D'autres mauvaises langues avaient murmuré à l'époque que c'était son impuissance qui avait conduit sa femme à repartir si vite. Denis Foenkinos, Le mystère Henri Pick
Puis les mois passent, jusqu'à ce qu'il nous arrive de nous rencontrer par hasard dans la rue encore une fois; acclamations de fêtes, rires, promesses de nous revoir, mais ni elle ni moi ne faisons jamais rien pour provoquer une rencontre; peut-être parce que nous savons que ce ne serait plus la même chose. Or, dans un monde simplifié et réduit, dans lequel le terrain serait déblayé de toutes ces situations préétablies qui font que des rencontres plus fréquentes impliqueraient entre nous une relation qu'il faudrait d'une manière ou d'une autre définir, peut-être en vue d'un mariage ou quoi qu'il en soit dans la perspective de former un couple, ce qui présupposerait des liens qui pourraient s'étendre à nos familles respectives, aux relations parentales ascendantes et descendantes, aux fraternités et aux cousinages, et impliquant toutes nos relations ainsi qu'un engagement dans la sphère des revenus et des biens patrimoniaux; une fois donc qu'auraient disparus tous ces conditionnements qui flottent silencieusement autour de nos dialogues et font qu'ils ne durent pas plus de quelques minutes, le fait de rencontrer Franziska devrait être encore plus beau et agréable. Italo Calvino, Si une nuit d'hiver un voyageur
Quand d'aventure il se rappelait précisément ce moment-là, il éprouvait toujours une certaine difficulté, a priori, à en admettre la réalité. Car Simon Clavin et Gervaise Bien étaient passés non seulement devant le maire mais avaient fait un crochet par l'église pour s'unir, tout ce qu'il y avait d'officiellement, devant Dieu et les hommes. N'eût été que d'eux, ils se seraient volontiers évité la corvée (et d'ailleurs, dans un roman que Simon ― Pierre Duhaut ― devait écrire plus tard, et dans lequel il mettait en scène l'événement quelque peu autobiographique de l'union, le cérémonial du mariage, à la fois civil et religieux, avait été gommé), et ne s'y étaient pliés que pour éviter à la maman de la mariée une crise hépatique de contrariété dont elle était bien capable. Ils se marièrent, vécurent un certain temps d'embrasement heureux et n'eurent qu'un seul enfant, à défaut de beaucoup, comme on ne dit pas dans les livres. Pierre Pelot, Braves gens du Purgatoire
Et voilà. Après avoir dûment recensé nos souvenirs encore frais, retour à la case de départ. À la raison, raisonnante, raisonnable. En un sens, Ilse n'a pas tout à fait tort. On pourrait, en effet, se demander. Elle et moi, si l'on se met à y penser. Est-ce que nous sommes vraiment compatibles, de mœurs, d'intérêts. Est-ce que. Quand on commence à réfléchir, c'est la fin: on commence à se séparer. Malgré toutes les raisons, un mariage est toujours déraison. Même de la main gauche. Même à la colle, rare que ça colle. Si l'on se met à supputer ce à quoi, ce dans quoi l'on s'engage. S'il fallait être prudent, pour éviter un faux pas, on ne pourrait plus faire un pas. Paralysie. La vérité n'est pas bonne à prédire: personne n'est fait pour vivre avec personne. Vice rédhibitoire, de naissance. On continue comme on a débuté dans la vie: en famille. Entre parents et enfants, le collage des collages: forcé. (...) Le mariage est une maladie d'enfance, qui laisse des traces indélébiles. On en retrouve les restes, les séquelles, sur le divan, plus tard. Serge Doubrovsky, Le livre brisé
Ah, regarde la photo de mariage. Qu'est-ce qu'ils étaient beaux Robert et Roberte quand ils étaient jeunes... Josette remarque que Roberte a l'air un peu triste sur la photo, mais elle ne le dit pas. - Elle s'est mariée jeune, dis donc, ta mère. À seize ans! Et ton père, trente-quatre? Ah oui! Dis-huit ans de différence, quand même. D'un coup, les filles devenaient des femmes, à l'époque. Pas facile, c'est sûr. Et puis, direct enceinte! Y avait pas la pilule, on oublie ça, nous. Mais, dis... tu savais que ta mère était enceinte de toi, avant de se marier? Regarde les dates... Le mariage. Et six mois plus tard, le bébé est là! Coquins, tes parents! Barbara Constantine, Allumer le chat
Philippe Toussaint dînait avec moi après que j'avais couché Léo qui s'endormait très tôt. Nous échangions quelques banalités sans jamais nous crier dessus. Nos rapports étaient à la fois cordiaux et inexistants. Encore que. Les couples qui ne crient pas, ne sont jamais en colère, sont indifférents l'un à l'autre sont parfois dans la plus grande violence qui soit. Pas de vaisselle cassée chez nous. Ni de fenêtre à fermer pour ne pas déranger les voisins. Que du silence. Valérie Perrin, Changer l'eau des fleurs
L'union de Laura et Volomari Volotinen s'avéra des plus heureuses. Il fut ainsi démontré par l'expérience qu'une femme mûre a tout d'un bon investissement: avec l'âge, les années s'accumulent, le capital augmente, elle acquiert une valeur muséale et un lustre historique. Il en va tout autrement d'une épouse de vingt ans: le charme de la jeunesse se dissipe à une vitesse incroyable, laissant derrière lui une coquille vide qu'une vie d'homme, aussi longue soit-elle, ne peut suffire à remplir. Arto
Paasilinna, Le dentier du maréchal,
La relation à la mort s'étant de plus en plus détériorée avec l'idéologie bourgeoise, on a commencé d'utiliser des techniques qui servaient dans d'autres civilisations au culte des morts ― ainsi la momification, la dessiccation, l'embaumement ― pour conserver les vivants. Et l'un des champs d'expérimentation les plus répandus et les plus gratifiants pour réduire la vie au strict minimum sans avoir néanmoins à la quitter tout à fait, a été longtemps le mariage. Christiane Singer, Éloge du mariage, de l'engagement et autres folies
«C'est ainsi quand on n'a plus de mari, on n'a plus rien», soupire-t-elle. Smith le sait: une femme n'a pas de bien propre, tout appartient à son époux. En se mariant, elle lui donne tout. En le perdant, elle cesse d'exister. Lackshamama ne possède plus rien, à part un bijou qu'elle est parvenue à dissimuler sous son sari, offert par ses parents le jour faste où, ornée de riches parures, elle avait été conduite au temple par sa famille en liesse pour célébrer ses noces. Elle était entrée dans le mariage avec somptuosité; elle en sortait dans le total dénuement. Elle aurait préféré que son mari l'abandonne, avoue-t-elle, ou la répudie, au moins la société ne l'aurait pas reléguée au rang de paria, peut-être ses proches auraient-ils montré quelque compassion, là où ils ne lui témoignaient que mépris et hostilité. Elle aurait préféré naître sous la forme d'une vache, ainsi elle aurait été respectée. Laeticia Colombani, La tresse
C'était un mariage de raison, et il n'y eut jamais d'affection, encore moins d'amour, entre les époux. Mon père s'est saoulé avec ses amis pendant la réception, et ma mère (...) a passé la soirée avec sa famille. Sur la photo de mariage, il ne reste que maman dans sa robe blanche. On a retiré papa d'un coup de ciseaux, comme elle-même l'a retiré de sa vie. Elle a d'ailleurs l'air très malheureuse sur ce cliché. Au soir des noces, quand l'époux est arrivé en titubant devant la chambre nuptiale, la porte était fermée à clef et il demanda en vain qu'on la lui ouvre. Jim Fergus, Marie-Blanche
Miai-kekkon : jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la plupart des mariages étaient arrangés. Nakodo (la marieuse) facilite les échanges d'informations entre les deux familles. La tradition veut que l'homme envoie des cadeaux (habituellement une bague de fiançailles et de l'argent) à la femme, lorsque sa demande est acceptée. Cette cérémonie d'engagement est appelée yuino. An
English Dictionary of Japanese Culture, de Bâtes Hoffer et Nobuyuki
Honna
Elle a été pour moi la jeune fille dont on remarque qu'elle met une certaine robe et cueille une certaine rose lorsque nous sommes invités, à dîner, et qui nous oblige à penser: «Doucement, doucement... C'est une affaire d'importance... Et d'ailleurs, est-ce qu'elle aime les enfants?» On observe qu'elle tient un peu gauchement son parapluie, mais qu'elle a montré de la compassion pour la taupe prise dans une trappe, et l'on se dit que somme toute elle saurait conserver quelque poésie aux tartines du petit déjeuner. (Tout en me rasant, je pensais aux déjeuners innombrables de la vie conjugale.) Virginia Woolf, Les Vagues
Tu
prends ça pour de l'amour? Ce n'était pas de l'amour. Les femmes ne
sont pas sur cette terre pour aimer. Quelle folie que tout ce
romanesque. Jackie Copleton, La voix des vagues
Louis soupçonnait fortement que cette stabilité apparente de leur union tenait à leur respect du mystère, de ce secret de Polichinelle que tout le monde a plus ou moins percé sans jamais le dire ouvertement, qui est que, quand on va vraiment au fond des choses, on s'aperçoit que le mariage est une complète fiction, qu'il n'y a pas plus d'union des âmes que de beurre en broche, que chaque âme reste enfermée à jamais dans une gangue impénétrable d'individualité farouche et définitivement fermée à toute espèce de raison. C'était cela le mystère. Et même quand on croyait connaître son partenaire comme sa poche, il arrivait encore qu'on tombe nez à nez avec une muraille aveugle ou qu'on soit happé dans un trou sans fond. Et parfois même on se trouvait égaré au milieu d'une zone de complète bizarrerie; ça vous arrivait tout à coup (quoique rarement, Dieu merci) et sans raison apparente, comme il arrive à un avion qui vole au milieu d'un ciel parfaitement serein d'être brusquement secoué par d'invisibles turbulences. Par exemple, on découvrait chez son conjoint une attitude ou une croyance qu'on n'avait jamais soupçonnée, une conviction tellement absurde (à vos yeux en tout cas) qu'elle frisait la psychose. Dans ces cas-là, quand on tenait à préserver la paix du ménage et sa propre tranquillité d'esprit, il valait mieux laisser pisser le mérinos et se répéter que les seuls gens qui perdent patience lorsqu'ils viennent de faire ce genre de découverte sont les insensés qui s'imaginent qu'on peut vraiment connaître l'esprit de quelqu'un d'autre. Stephen King, Simetierre
L'année précédente, on l'avait fiancée à un garçon de la noblesse locale. J'avais admiré sa dot dont les malles laquées cramoisies avaient occupé tout un pavillon. À compter ses vaisselles de Jade, d'or, d'argent, ses draps de velours et de satin, ses robes innombrables et ses chaussures brodées, j'avais même éprouvé de l'envie. Je n'avais pas compris ce qu'était le mariage. Ce fut seulement après son départ que je réalisais qu'un monde harmonieux où chaque chose se tenait à sa juste place venait de s'effondrer. Plus tard, accompagnée de son époux, Pureté revint à la maison maternelle. Comme je l'avais craint, la frange relevée, le visage épilé, les joues fardées, les cheveux en chignon, elle n'était plus ma soeur. Elle était devenue femme! Shan Sa, Impératrice
Vous allez bientôt partir pour le Portugal. (...) Cette ambassade est très officielle. (...) Vous remettrez au roi Jean la lettre par laquelle je [Philippe III de Bourgogne dit Philippe le Bon] lui demande la main de sa fille, l'infante Doña Isabel. Avec l'humilité qu'il sied. La lettre et la demande, je veux dire. Vous, on doit vous traiter avec les plus grands égards, ainsi que si c'était moi-même qui me rendais en Lusitanie. (...) On doit aussi vous remettre la future duchesse afin que vous la conduisiez à Bruges où nous recevrons les sacrements. L'été prochain. Si Dieu le veut. Il y a Dieu et il y a moi, tel est le vrai. Et ce mariage, Dieu le veut plus que moi, maître Johannes. Vous savez ce qu'il en est de mon goût pour les épousailles. J'y vais parce qu'il le faut, comme on va au pot par temps de colique. Jean-Daniel Baltassat, Le valet de peinture
Si, finalement, ils acceptèrent le mariage, bien qu'à contrecœur ― un véritable miracle, en fait ―, ce fut grâce à M. Honda. M. Honda leur posa de nombreuses questions à mon sujet et prédit que le serais un merveilleux compagnon pour leur fille, que si elle voulait m'épouser, ils ne devaient surtout pas s'y opposer, sinon, les conséquences risquaient d'être désastreuses. Les parents de Kumiko avaient une confiance absolue dans les prédictions de M. Honda, il leur fut donc impossible après cela de faire la moindre objection à notre mariage. Haruki Murakami, Chroniques de l'oiseau à ressort
La bizarre comédie que fut le jour de mon mariage! Trois semaines de fiançailles, la présence fréquente de ce Renaud que j'aime à l'affolement, ses yeux gênants, et ses gestes (contenus cependant) plus gênants encore, ses lèvres toujours en quête d'un bout de moi me firent pour ce jeudi-là une mine aiguë de chatte brûlante. Je ne compris rien à sa réserve, à son abstention, dans ce temps-là! J'aurais été toute à lui, dès qu'il l'eut voulu; il le sentait bien. Et pourtant, avec un soin trop gourmet de son bonheur ― et du mien? Il nous maintint dans une sagesse éreintante. Sa Claudine déchaînée lui jeta, souvent, des regards irrités au bout d'un baiser trop court et rompu avant le... avant le temps moral: «Mais enfin, dans huit jours ou maintenant, qu'est-ce que ça fait? Vous me brégez inutilement, vous me fatiguez affreusement...» Sans pitié de nous deux, il me laissa toute intacte, malgré moi, jusqu'à ce mariage à la six-quat'deux. Colette et Willy, Claudine en ménage
La noce, débouchant de la rue Saint-Denis, traversa le boulevard. Elle attendit un moment, devant le flot des voitures; puis, elle se risqua sur la chaussée, changée par l'orage en une mare de boue coulante. L'ondée reprenait, la noce venait d'ouvrir les parapluies; et, sous les riflards lamentables, balancés à la main des hommes, les femmes se retroussaient, le défilé s'espaçait dans la crotte, tenant d'un trottoir à l'autre. Alors, deux voyous crièrent à la chienlit; des promeneurs accoururent; des boutiquiers, l'air amusé, se haussèrent derrière leurs vitrines. Au milieu du grouillement de la foule, sur les fonds gris et mouillés du boulevard, les couples en procession mettaient des taches violentes, la robe gros bleu de Gervaise, la robe écrue à fleurs imprimées de madame Fauconnier, le pantalon jaune-canari de Boche; une raideur de gens endimanchés donnait des drôleries de carnaval à la redingote luisante de Coupeau. Émile Zola, L'assommoir
Il
l'embrassa derrière une colonne pendant que l'attention générale était
absorbée par l'entrée du cortège à la sacristie. Près de la porte,
ils attendirent l'arrivée de deux ou trois voitures qui s'étaient
éloignées et assistèrent à la sortie des nouveaux époux. Sue soupira. Thomas Hardy, Jude l'obscur
Sa
femme, entendant le bruit de ses pas, sort de sa chambre et se jette sur
lui en criant d'une voix traînante d'opéra chinois: Dai Sijie, Le complexe de Di
― Enfants, les femmes dépendent d'un père et de sa fortune changeante. Adultes, elles s'attachent à un époux inconstant. Tantôt abandonnées, tantôt adulées, rongées de jalousie, malades de soupçons, les femmes meurent de chagrin, s'éteignent en couches, sont fauchées par les maladies. L'homme est l'ennemi de la femme! Les pères marchandent nos mariages, les époux mentent et nous exploitent, les enfants trahissent et nous assassinent! Dames nobles, bourgeoises, paysannes, toutes ressemblent aux bêtes de trait qui tirent la charrette d'une existence vaine. (...) On me demande souvent comment une femme pourrait acquérir sa liberté. Je réponds que la liberté de la femme commence quand elle comprend le mot «indépendance»: refuser la douceur de la soie, le délice des mets, l'enchaînement de l'amour, l'asservissement de la fécondité, renoncer aux agréments, aux envies, aux illusions! Oubliez les seins qui allaitent les chagrins, oubliez le ventre qui enfante les crimes, refusez les caresses, origine de toutes les douleurs. Rompez avec le foyer, les hommes, le plaisir, c'est le premier pas vers la délivrance! Shan Sa, Impératrice
Ma femme, malgré tout, j'y tiens. Terriblement. On a beau avoir nos différents, nos différences. Féroces. J'y suis attaché. Pour toutes sortes de raisons, de bonnes, de mauvaises. Comme toujours. D'abord, je m'aime. J'ai besoin d'elle. L'appartement, ici, soudain, sans elle. Je ne peux pas l'imaginer. Elle me meuble. De la cave au grenier, de fond en comble. Une sacrée présence. Ma vie, sans elle, si elle venait à disparaître, il y aurait un tel abîme, un tel trou. LE TROU DES TROUS. Je tomberais tout entier dedans, tête la première. Une chute mortelle. Alors voilà. Pourquoi n'a-t-elle pas encore appelé depuis Londres. Je me demande. Je ne demande pas: j'exige. ELLE DOIT. ELLE AURAIT DÛ. SI MOI, j'étais parti. Si MOI, je n'avais pas téléphoné. Ah, ah! On entendrait quelque chose. De gratiné. Des vertes et des pas mûres. J'en prendrais pour mon grade. J'aurais droit à une engueulade maison. Spécialité de notre home. On a un foyer de discorde. Ensemble, au lit, nous sommes très unis. Quand on s'emmanche, le dimanche, nos visions du monde s'emboîtent. Après, souvent, pendant la semaine, ça boîte. Lorsque nos membres se désemmêlent, on a des vues séparées. On ne voit pas toujours tout du même œil. Tout le temps l'un contre l'autre, il y a friction. Mais, sinon s'éloigne, ça nous rapproche. Serge Doubrovsky, Le livre brisé
Si l'un des époux ne supporte pas que l'autre vibre, vive et aime en dehors de sa présence, s'il se met à rêver d'être la seule source de son bonheur, il peut avoir au moins une certitude: celle de devenir la seule source de son malheur. Christiane Singer, Éloge du mariage, de l'engagement et autres folies
«
Rébéka portait les maro mouillés, tordus à la hâte, et qui
ruisselaient. Samuéla, fier d'un plein panier d'écrevisses, chantonnait
un petit péhé jovial. Ils aperçurent le Missionnaire: sitôt
Eréna-aux-Fleurs cacha les grandes corolles et couvrit son sein nu. Le
pêcheur assoupit sa chanson. Toute joie tomba. Victor Segalen, Les Immémoriaux
... laissons ça, laissons notre mariage et parlons de celui de dimanche prochain, il faut acheter un cadeau, à mon tour, je souris, il n'y a qu'une chose que tu as omis de me dire, c'est qui se marie, répond posément, j'attendais que tu me le demandes, c'est mon ami Tim je crie, tu te fous de moi, elle dit, moi, pas du tout, pas soufflé cette fois, estomaqué, époustouflé, ébahi, ébaubi, abasourdi, j'en suis sonné, je re-crie, ne te moque pas de moi, eau limpide de ses prunelles, voix ingénue, mais je ne me moque pas de toi, Tim se marie dimanche et nous sommes invités, là j'enrage, tu ne vas pas me dire qu'il a viré sa cuti, Ilse connaît très bien le français, mais l'expression lui échappe, qu'entends-tu par là, je ricane, il n'a pas soudain changé de goût, il ne s'est pas mis à aimer les femmes, toujours calme, non, bien sûr, je triomphe, alors comment peut-il se marier, elle répond, il épouse un homme, j'en suis resté comme deux ronds de flan, tu te paies ma tête, elle secoue la sienne, mon pauvre Serge, tu es vraiment, comment dit-on en français "old-fashioned", je dis, vieux jeu, elle sourit, eh bien, tu es vieux jeu, l'Amérique me stupéfie toujours, Ilse souvent, entre nous vingt-trois ans de différence, elle vit dans un autre monde, pour elle le mien est ringard, je lâche, même ici, je doute que Tim et, au fait, sa femme ou son mari, puissent comme nous convoler à City Hall, elle rétorque, non, mais ils auront un bien plus beau mariage que nous, ils se marieront à l'église, et ils auront une grande réception après, je m'exclame, pour se marier à l'église, il faudrait qu'ils trouvent un prêtre qui unisse deux hommes, Ilse, il y en a, ils ont sur Christopher Street leur propre paroisse... Serge Doubrovsky, Laissé pour conte
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En y réfléchissant, nous nous sommes aperçus qu'aucun de nos
mariages n'a été un [vrai] mariage. Jean-Christophe Rufin, Les sept mariages d'Edgar et Ludmilla |
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