Le Café Littéraire /ivresses |
La
caravane pressée Omar Khayyam
Si quelque chose devait me manquer, ce ne serait pas le vin, ce serait l'ivresse. Audiard
M. Grinsted est revenu sans tarder muni d'un plateau, de coupes à champagne
et d'une bouteille de Dom Perignon dans un seau. Oncle Leander l'a débouchée
lui-même, avant de remplir les verres, que le majordome a distribués. Jim Fergus, Marie-Blanche
Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne
pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche
vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. Baudelaire, Le Spleen de Paris, XXXIII
Voici
venir les jours où les œuvres sont vaines
Après le dessert et ce dernier verre, j'étais complètement, désespérément saoule. L'expression triomphante de ces dames Anglaises m'a brusquement exaspérée. Me levant en vacillant, je leur ai jeté une telle insulte qu'en y repensant aujourd'hui, je rougis encore. J'allais faire bien pire dans ma longue carrière d'ivrogne, mais c'était la première fois. S'ensuivit un silence stupéfait, et Arthur, interloqué, éclata de rire. J'ai repoussé mon siège, m'apprêtant, indignée, à quitter la pièce. Mais j'en fus incapable, j'avais la tête qui tournait et, perdant l'équilibre, je me suis écroulée sur la table dans un fracas d'assiettes brisées. (...) Quand nous en avions le temps, oui, nous allions dans les bars, et là, je buvais. Je n'ai jamais franchement supporté l'alcool. Je me sentais bien après un premier verre, ça me détendait, c'était agréable d'être un peu gaie, mais au second j'étais ivre, et au troisième complètement paf. Ensuite, je ne savais plus me tenir. (...) Josette a dû essayer de me réveiller plus tôt ― oui, ça, je m'en souviens vaguement. C'est même une des rares choses qui me reviennent en mémoire. Malgré les gueules de bois épouvantables qu'il faut endurer, l'un des plaisirs méconnus de l'alcoolisme est qu'il revient aux autres de s'occuper de vous. Mais aussi qu'on passe pas mal de temps au lit, et ― surtout ― qu'on se rappelle rarement ses écarts de conduite. On ouvre brusquement les yeux et on trouve son chemisier repassé. Jim Fergus, Marie-Blanche
«
Il dévorait des livres par douzaines, et lisait tout, ce qui lui tombait
sous la main, même lorsque son valet de chambre l’aidait le soir à se
déshabiller ; il allait ainsi de la veille au sommeil, pour se livrer de
nouveau le lendemain aux oiseux bavardages des salons et des clubs, et
passer son temps entre les femmes et le vin. La boisson devenait de plus
en plus pour lui un besoin physique aussi bien que moral, et il s’y
adonnait avec passion, en dépit des avertissements des médecins, qui, vu
sa corpulence, y trouvaient un danger sérieux pour sa santé. Il ne se
sentait heureux et véritablement à son aise que lorsqu’il avait avalé
plusieurs verres de spiritueux : la douce chaleur, la tendre bienveillance
pour son prochain, qu’il éprouvait alors, le rendait capable de
s’assimiler toute pensée sans toutefois l’approfondir. Alors
seulement le nœud gordien si compliqué de la vie perdait à ses yeux de
son effrayant mystère, et lui paraissait même facile à dénouer ; alors
seulement il se disait : « Je le déferai, je l’expliquerai… tout à
l’heure j’y penserai ! » Mais ce « tout à l’heure » ne venait
jamais, et il n’y repensait que pour voir de nouveau ces énigmes se
dresser devant lui, plus terribles et plus insolubles que jamais, et il se
hâtait de reprendre ses lectures pour chasser les pensées pénibles. Léon
Tolstoï, Léon. « La Guerre et la Paix – Tome II
Édouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule |
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