Le Café Littéraire/ Chouette's
à voir et à lire
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Il approchait, lent, avec un son lourd, bien martelé, répercuté par les planchers anciens. Il entra, au bout d'un temps qui nous parut interminable, dans le chemin éclairé. Il était presque blanc, gigantesque: le plus grand nocturne que j'aie vu, un grand-duc plus haut qu'un chien de chasse. Il marchait emphatiquement, en soulevant ses pieds noyés de plume, ses pieds durs d'oiseau qui rendaient le son d'un pas humain. Le haut de ses ailes lui dessinait des épaules d'homme, et deux petites cornes de plumes, qu'il couchait ou relevait, tremblaient comme des graminées au souffle d'air de la lucarne. Il s'arrêta, se rengorgea tête en arrière, et toute la plume de son visage magnifique enfla autour d'un bec fin et de deux lacs d'or où se baigna la lune. Il fit volte-face, montra son dos tavelé de blanc et de jaune très clair. Il devait être âgé, solitaire et puissant. (…) Il avait des manières de maître, une majesté d'enchanteur… Colette, La Maison de Claudine
Comme les yeux de la chouette, certaines pensées ne supportent pas la lumière du jour. Elles ne peuvent naître que la nuit, où, exerçant la même fonction que la lune, elles meuvent des marées de sens dans un Invisible ailleurs de l'âme. Michela Murgia, Accabadora
Marche-à-terre se mit à siffler trois ou quatre fois de manière à produire le cri clair et perçant de la chouette. Les trois célèbres contrebandiers employaient ainsi, pendant la nuit, certaines intonations de ce cri pour s'avertir des embuscades, de leurs dangers et de tout ce qui les intéressait. De là leur était venu le surnom de Chuin, qui signifie chouette ou hibou dans le patois de ce pays. Ce mot corrompu servit à nommer ceux qui dans la première guerre imitèrent les allures et les signaux de ces trois frères. Honoré de Balzac, Les Chouans.
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De plus, les archiducs
nichent par là en nombre paraît-il, et les bûcherons gardent
d'anciennes terreurs vis-à-vis du rapace. Par égard pour leur propre
enfance, ils nourrissent un respect obscur pour le grand oiseau blanc,
qu'ils ne tiennent pas à déranger.
Françoise Desbiez, Troubles à Froidecombe.
Le caractère distinctif de ces deux genres (hibou et chouette),
c'est que tous les hiboux ont deux aigrettes de plumes en forme
d'oreilles droites de chaque côté de la tête, tandis que les
chouettes ont la tête arrondie, sans aigrettes et sans aucune plume
proéminente. Buffon, Histoire naturelle des oiseaux.
(…) il a le retrait de la face et les broussailles effilées de la
chouette. André Suarès, Trois hommes, " Ibsen " Il y avait bien longtemps que les hiboux et les corbeaux étaient
ennemis. Leur hostilité remontait au jour où, un hibou allant être
élu roi, un corbeau se présenta et déclara que pour rien au monde il
ne fallait confier la couronne au moins charitable et au plus sot de la
gent ailée. Si toutefois l'on ne pouvait faire autrement, il faudrait
diriger les affaires sans lui, à l'instar du lièvre qui prétendait
que la lune était sa souveraine, alors qu'il agissait de son propre
chef. Les corbeaux contre les
hiboux, Manuscrit Schefer, Art du livre arabe. L'Aigle et le Hibou L'aigle et le chat-huant leurs querelles cessèrent, Je suis la femme du Hibou Je suis la femme de ménage de la lune Léo Ferré, La nuit (Feuilleton lyrique).
À midi
sous les houx Ma cousine Hagésichore,
Jean
Chevalier et Alain Gheerbrant, Dictionnaire des symboles : Dans
la civilisation de la Grèce antique, la chouette, oiseau nocturne, en
relation avec la lune, ne peut supporter la lumière du soleil, elle
s’oppose donc en ceci à l’aigle, qui la reçoit les yeux ouverts. Guénon
a noté qu’on pouvait voir là, ainsi que dans le rapport avec Athéna-Minerve,
le symbole de la connaissance rationnelle – perception de la lumière
(lunaire) par reflet – s’opposant à la connaissance intuitive –
perception directe de la lumière (solaire)
Le
hibou, parce qu’il n’affronte pas la lumière du jour, est symbole de
tristesse, d’obscurité, de retraite solitaire et mélancolique. La
mythologie grecque en fait l’interprète d’Atropos, celle des Parques qui
coupent le fil de la destinée. En Egypte, il exprime le froid, la nuit, la
mort. C’est
un des plus anciens symboles de la Chine, il remonte aux époques dites
mythiques. D’après certains auteurs, il se confondait avec le Dragon-Flambeau,
emblème de la seconde dynastie, celle des Yin. Il est l’emblème de la
foudre, il figurait sur les étendars royaux. Il est l’oiseau consacré aux
forgerons et aux solstices ; dans les temps archaïques, il présidait
les jours où les forgerons fabriquaient les épées et les miroirs magiques. Chez les Aztèques, la chouette est l’animal symbolique du dieu des enfers, avec l’araignée. Dans plusieurs Codex, elle est représentée comme la gardienne de la maison obscure de la terre. Associée aux forces chtoniennes, elle est aussi un avatar de la nuit, de la pluie, des tempêtes. Ce symbolisme l’associe à la fois à la mort et aux forces de l’inconscient luni-terrestre, qui commandent les eaux, la végétation et la croissance en général. * Dans les légendes malaises la chouette est amoureuse de la lune :
Zénon regardait la grange délabrée. Au haut de la porte, quelqu'un
jadis avait, selon l'usage, affixé un hibou sans doute atteint d'un
coup de pierre et cloué vivant ; ce qui restait des plumes bougeait
dans la brise. Marguerite Yourcenar, L'Œuvre au Noir.
Mon
ombre était bien plus forte et bien plus nette que mon corps. Mon
ombre était plus réelle que mon corps. Il m’apparut que le vieux
brocanteur, le boucher ou Nounou et ma garce de femme, n’étaient
qu’autant d’ombres de moi. Des ombres dont le cercle me retenait
prisonnier. Je ressemblais à une chouette, mais mes plaintes
s’arrêtaient dans ma gorge et je crachais des caillots de sang.
Peut-être la chouette souffre-t-elle d’une maladie qui lui inspire
des idées pareilles aux miennes. Mon ombre sur le mur était
exactement celle d’une chouette, elle se penchait pour lire ce que
j’écrivais. Certainement, elle comprenait bien, elle seule pouvait
comprendre. Lorsque je la regardais à la dérobée, elle me faisait
peur. Sadegh Hedayat, La Chouette aveugle . Les
hiboux Sous
les ifs noirs qui les abritent, Sans
remuer ils se tiendront Leur
attitude au sage enseigne L'homme
ivre d'une ombre qui passe Charles Baudelaire, Les fleurs du mal
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