Le
Café Littéraire
luxovien / Les Petites fugues 2004 :
Sur le thème : Le temps, la nuit |
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Rencontre avec Brigitte Giraud
Marie-Françoise : Brigitte Giraud a commencé par
lire un extrait d'un de ses livres. J'ai été frappée par la
rapidité de sa lecture orale. Elle avouera ne pouvoir
s'astreindre à lire lentement, posément, en mettant le ton comme les
comédiens. J'ai compris pourquoi en lisant "Marée Noire"
son dernier ouvrage. Je suis restée sur cette idée d'une vie à cent à l'heure et d'une femme qui aime se battre avec les mots, les phrases, le rythme, la vie, transformer et distordre le réel. Car pour Brigitte Giraud "écrire est une des seules expériences humaines qui ne soit pas dans la soumission". Elle aime la sensation de tension éprouvée en écrivant. Elle ne sait pas où elle va quand elle commence un livre. C'est la lecture de " Requiem 1900 " de Calaferte qui a déclanché son écriture. Elle ne se classe pas dans la littérature
dite "féminine", synonyme pour elle de mièvrerie. Petite fille elle aurait aimé être un
garçon. Elle ne prend pas le temps de s'amollir, ni de s'attendrir sur
elle-même. Même lorsqu'elle subit des coups durs comme le décès de son
compagnon qui fut matière à l'écriture de son livre
" À présent".
Rencontre avec Thierry Beintingel
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La
bibliothèque de Fontaine lès Luxeuil recevait l'auteur Thierry
Beinstingel
Rencontre avec Jean-Michel Olivier
Marie-Françoise : Dès son entrée
dans le hall de la bibliothèque municipale, ancienne maison du Bailli et
monument historique de Luxeuil qui date des XV ou XVIème
siècle, et avant qu'il ne prenne place, les personnes venues à cette
lecture
rencontre ont pu remarquer que Jean-Michel Olivier était un grand
écrivain, ne serait-ce que par sa taille. Avec le mot "disparition",
on se rapproche d'un autre thème cher à
Jean-Michel Olivier, celui des fantômes, n'a-t-il pas écrit un
mémoire de licence intitulé: "Lautréamont :Le texte du
vampire".? Jean-Michel Olivier ne s'est pas expliqué sur la question à lui posée du rôle négatif que jouent les femmes, les mères dans ses livres, lui qui reprend dans son ouvrage de nouvelles intitulé : Le Dernier mot, cette phrase de Sollers : " Oui, le monde appartient aux femmes.... c'est à dire à la mort." et dans Le voyage en hiver : "La transmission de la vie, voilà le crime"; ni sur celui de l'influence sur ses thèmes d'écriture de Jacques Derrida dont il suivit le séminaire, lequel disait : "Nous mourons tous plus d'une fois, en plusieurs temps", phrase qui pourrait presque résumer L'Amour fantôme. Il a préféré évoquer ce philosophe qu'il a bien connu et avec lequel il était resté en relation amicale. Peut-être ces questions touchaient-elles à quelque chose de trop intime sur lequel il ne souhaitait pas s'étendre. Lui qui a écrit sous différentes formes dans presque tous ses livres : "Ce doux bonheur d'inexister." Aux lecteurs de deviner ce qu'il a mis de personnel dans ses ouvrages. Il nous a donc paru assez réservé sur lui-même -est-ce par timidité ou à cause de cette part de "secret" derrière lequel se retranchent les Suisses?- il l'évoque d'ailleurs aussi dans ses livres ce secret cher aux Suisses ; et homme capable de se contenter de silence. Secret, silence et musique, autres thèmes à lui chers, qui nourrissent également presque toutes ses oeuvres. Pour finir, je dévoilerai que son intense soif a frappé le public. La pizza "Le Carnot" dont il s'était sustenté vite fait avant la rencontre était-elle à ce point pimentée ? Ou était-ce simplement un moyen élégant de combler les silences ?
Rencontre avec Eric Faye
Martine Mouhot : Le programme des
petites fugues annonce Eric Faye à la bibliothèque de Melisey, en ce
vendredi de novembre. La rencontre
débute par la présentation d'une œuvre conséquente, partagée entre
essais, romans et nouvelles. Puis Eric Faye se saisit du recueil "Je
suis le gardien du phare" - son livre préféré - et lit à
haute voix "L'agenda". Le public plonge dans cet
univers, cher à l'auteur, où le réel est traversé soudain de
fantastique. Quand il écrit un roman, il connaît le début, la fin, mais les choses se mettent en place, petit à petit. Son rapport au temps est particulier : il lui faut accepter d'attendre et pour mieux se faire comprendre, il prend l'exemple du pêcheur en attente de voir bouger le bouchon, ainsi doit-il être "à l'écoute de son propre cerveau". La construction d'un roman le gêne : "C'est tout une entreprise" mais la nouvelle Je suis le gardien du phare fait quand même 80 pages. Sept années lui seront nécessaires pour être satisfait de ce recueil, l'aimer suffisamment pour être prêt à le publier. Grand lecteur, il affirme avec une espèce de fascination que la lecture "permet d'inventer un autre langage entre auteurs et lecteurs, c'est une véritable communication à travers le temps, une façon de trouver ses amis au delà de la vie de chacun". Sa rencontre avec Ismaël Kadaré fut l'occasion de former son regard. "Ecrire,
c'est un état d'esprit, un filon qu'il faut porter vers une dimension
d'écriture inhabituelle. Il faut créer un bain favorable à
l'écriture, un climat poétique, pas forcément de la souffrance, la
vie ne suffit pas"et de citer Baudelaire "….il faut
vous enivrer sans trêve. Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu,
à votre guise. Mais enivrez-vous." Le festival avait pour thème le temps, la nuit ; à Besançon, Eric Faye, parlera de son rapport particulier à la nuit, il confiera avoir été un enfant somnambule. Il soulignera ce moment particulier d'hypnose légère chargée d'euphorie "où l'insomnie est un terreau fertile pour écrire". L'homme s'est montré convaincant, à provoquer l'envie de lire très vite la nouvelle "Je suis le gardien du phare", un vrai régal. Oui, il est bien agréable de partager - auteur et lecteur - et parfois cela peut être "jubilatoire" ! Eric Faye, soyez assuré, ce fut une belle rencontre, à Melisey, suivie quelques temps plus tard, d'une belle lecture!
Adéla : C'est le visage tout empreint de fraîcheur attentive, et d'un apparent reste de timidité enfantine, qu'Éric Faye nous a présenté son travail. Pour
répondre à la question : Pourquoi écrivez-vous ? Il cite Pessoa :
" La littérature c'est l'aveu que la vie ne suffit pas.
" Il
ne peut écrire à partir de rien. Il part d'une émotion. L'émotion
est favorable à l'écriture, mais ce n'est pas forcément la
souffrance qui le pousse à écrire, tient-il à préciser.
Enfin, il déplore que de nos jours le culte du moi - de moins en moins d'auteurs s'effacent dans les livres actuels - conduise à la surdité, à n'entendre plus les autres. Cette rencontre nous aura confirmé ce que laissaient pressentir ses textes : Éric Faye est un écrivain d'une rare humanité.
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