Le Café Littéraire /en lenteur avec Fabio Viscogliosi | ||||||||
Avec quelques
dessins de l'auteur,
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Les meilleurs titres hibernent dans l'attente d'un réveil en pleine lumière. Ils résonnent de leurs propres échos. Sournois, ils surgissent à l'improviste, dans le mouvement de nos bras, dans notre sommeil, nous piègent au creux d'une conversation, dans le brouhaha ou le silence, et soudain s'imposent, se dressent en poteaux indicateurs, désignent tout à la fois une direction, une posture, un état. Il suffit de les suivre. Vus sous cet angle, les titres prédisent l'avenir. Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.17
Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.29
Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.97
Dans la tourmente des jours sans forme, équipé d'un tourne-disque Philips, je me suis mis à écouter ma collection de quarante-cinq tours sur la position trente-trois. Cela m'occupait des heures que je ne voyais pas passer. Les voix des "Beach Beys" se transfiguraient en une bouillie merveilleuse et la section rythmique de "Good Vibration" me révélait autant d'interstices insoupçonnés. Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.128
Ma famille venait d'Italie et j'ai souvent eu du mal à me sentir français. (…) Un signe ne trompait pas: notre nom n'apparaissait encore dans aucun cimetière, et la plupart de mes professeurs l'abrégeaient ou l'écorchaient à l'envie. On me répétait : "Ton nom est impossible". Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.132
À la maison, nous avions enregistré La Corde sur une casette vidéo, et il m'arrivait souvent de la regarder, comme on se penche à la fenêtre pour voir le temps qui passe. Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.157
Certaines données ont la force de l'évidence. Elles surgissent, malgré nous, quelle que soit l'heure, la couleur du ciel ou la qualité de l'air. Ce matin, glissant entre les allées du parc zoologique, près de la fosse aux lions, celle-ci s'impose à moi: les animaux n'ont pas de rendez-vous, sinon avec eux-mêmes. Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.168
Je m'apprivoisais parfois à la bibliothèque de mon arrondissement, mais ces lieux sentaient trop fort. Ils sentaient l'attente, l'ennui et les après-midi moites. Tous ces ingrédients viennent se fondre dans la matière plastique dont on les recouvre. (…) L'odeur ― chimique et fétide à la fois ― adhérait aux ouvrages de manière indéfectible, tant elle s'était infiltrée dans les fibres de chacune des pages, de chacun des mots semblait-il. La position couchée que j'adoptais pour lire relevait de la nausée, en accusait le sentiment de fatigue et d'usure tiède. Le texte tout entier baignait dans son jus de bibliothèque. Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.178
Pendant longtemps,
je n'ai pas manifesté beaucoup d'enthousiasme à l'idée de
"promenade". J'éprouvais même une forme de mépris à son
égard, je disais hâtivement : "La promenade, cet avatar mou de
l'aventure." Je suis pour tout ce qui aide à traverser la nuit, p.286
Tous les rouleurs le savent. Des phrases surgissent du néant comme du goudron, elles s'assemblent en petits paragraphes, on les répète et les remâche, de peur de les oublier. Certaines choses s'écrivent ainsi, mieux qu'ailleurs, par impressions, dans le vrac des kilomètres. Apologie du slow, p.18
En temps réel, il est difficile de déterminer l'importance que revêt une chose ou une autre. Apologie du slow, p.55
Comme cette formule glanée il y a longtemps dans un Précis d'optique à l'usage des classes secondaires, formule magique que je conserve soigneusement, ne sachant trop qu'en faire, et n'ayant jamais totalement résolu le mystère qu'elle renferme: "La surface d'une eau qui dort est aussi un miroir plan." Apologie du slow, p.71
Nous savons trop bien, l'un et l'autre, ce que signifie les disparitions aussi soudaines qu'un claquement de doigts, et dont l'écho se prolonge loin dans le cœur et l'esprit. C'est un sentiment que nous partageons depuis longtemps, un sentiment irrésolu, un de ceux qui vous poursuivent sans cesse et dont on ne sait que faire. Apologie
du slow, p.107
Comment
font les gens pour passer le temps ? Apologie du slow, p.121
Apologie du slow, p. 201
Certains écrivains ont la bonne idée, l'énergie ou l'obstination de tenir leur journal, une vie entière, à coups de petits textes en miroir. Cela m'a toujours impressionné, moi qui n'ai de constance en rien (mais je me rassure en le disant que mon agitation quotidienne, mise bout à bout, finit bien par composer une forme de journal, sans date). Apologie du slow, p.157
Mont
Blanc, p.31
Mont Blanc, p.53
Mont Blanc, p.54
La mélancolie est un point de côté dont on se défait difficilement. Mont Blanc, p.130
Je roulais et je pensais que, depuis de trop nombreuses années, le mont Blanc était devenu, pour moi aussi, une montagne analogique, un relief imaginaire et dangereux qu'il s'agissait de franchir une bonne fois ou d'ignorer à jamais. Mont
Blanc, p.162
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