par
Marie-Françoise:
Les membres et amis du Café littéraire luxovien (activité mensuelle
du Centre Social Saint Exupéry), augmentés pour l'occasion de lecteurs
de la bibliothèque et d'amateurs des rencontres incontournables avec
des écrivains que sont devenues les Petites fugues en littérature
contemporaine initiées chaque année au mois de novembre par le Centre
Régional du Livre de Franche-Comté, recevaient Fabio Viscogliosi.
L'auteur, français, fils d'immigrés
italiens, attirait à la Bibliothèque municipale de Luxeuil, où se
déroulait la rencontre lundi 17 novembre, par les titres de ses
derniers ouvrages :
―
"Mont
Blanc" (paru en 2011 chez Stock), traite de l'accident du
tunnel du mont Blanc où il perdit brutalement ses deux parents alors
qu'il avait 34 ans. "Après le décès d'une personne qui vous est
chère, on entre brusquement dans un autre monde" confie-t-il. Il relate l'accident et ce que l'on en sait dans la
première partie du livre, et tout ce à quoi l'on est inévitablement
confronté après un décès, et dans son cas précis, en surplus, le
procès et sa longue instruction. Il relate ses pensées, ses humeurs au
grès de ces années, se refusant "à faire le deuil". Elles
donnent lieu à des chapitres agencés en suites de récits, d'images et
de souvenirs en correspondance, mêlés d'un sourire tendre et piquant
à la fois. Mais sans s'étaler sur lui même, sans pathos. Relevant à
la fin le défi : "J'avais rendez-vous avec la vie, je ne voulais
surtout pas la faire attendre".
―
"Apologie du slow" (paru en 2014, toujours chez Stock), est
un titre un peu trompeur dans le sens où il ne s'agit pas à proprement
parler de la danse que l'on sait, même si l'auteur est connu pour avoir
par ailleurs produit une œuvre musicale sous le nom de Fabio, mais de
sa lenteur, ou plutôt du mouvement, du déplacement... Fabio Viscogliosi avouant avoir un
problème avec la vitesse.
Dans "Apologie su slow", comme dans les ouvrages précédents de l'auteur, on retrouve la
manière d'écrire qui lui est propre : de nombreux chapitres parfois de
quelques lignes, parfois de plusieurs pages où le vagabondage de ses
rêveries et souvenirs le portent à évoquer, non sans humour, des
cinéastes, musiciens, chanteurs, peintres, écrivains, mais aussi ses
parents, son père, des personnes par lui connues, des animaux, même
l'univers….
Il faut dire que Fabio Viscogliosi a une
grande culture et s'intéresse à bien des domaines. Grand lecteur et
amateur de cinéma, il est aussi dessinateur (il a étudié le dessin
technique et les arts appliqués aux beaux-arts à Paris), musicien et
chanteur. Papillonnant en quelque sorte parmi ces divers arts qu'il
maîtrise, de même il écrit, d'où ses chapitres et leur enchaînement
particulier, genre "marabout bout de ficelle" bien souvent,
qui entraîne le lecteur à poursuivre agréablement sa lecture en
"une bonne flânerie, légère, désinvolte et peut-être
inutile", pour reprendre le souhait qu'il émet pour quiconque
à la fin d'un précédent ouvrage intitulé "Je suis pour tout
ce qui aide à traverser la nuit " (paru chez Stock en 2010).
Mais ne nous y trompons pas, si dans ses
ouvrages le lecteur peut un tantinet cerner l'auteur, ce dernier ne
s'expose pas lui-même, ne fait pas œuvre d'exhibitionniste. Tout en
pudeur, c'est à travers ce et ceux qu'il évoque qu'on le découvre,
comme à travers un miroir qui en renverrait le reflet ou l'écho (mot
que Fabio aime beaucoup), où le lecteur pourrait se reconnaître aussi…
Enfin, il nous confie aimer la
contradiction, on la retrouve dans ses pages, il aime les aller-retour,
en arrière, en avant (un peu comme la danse somme toute) et confie
également que quelques citations qu'il met entre guillemets et attribue
à tel ou tel, il les a inventées, que d'autres, réelles, il les a
glissées sans guillemets dans son propre texte… Mais ce faisant, il ne
trompe pas le lecteur, il ne fait que son travail d'écrivain, créant
une œuvre littéraire dans laquelle se mêlent ses souvenirs, vrais et
transformés, patinés par le temps, ou recréés par l'imagination,
parfois même inventés.
Fabio Viscogliosi et
Marie-Françoise Godey à Luxeuil
Photo: Nicole Grépat